Collectif culture du PCF

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Peines d’adultes pour mineurs délinquants: Vers la fin de la justice des mineurs

le 21 June 2011

 Peines d’adultes pour mineurs délinquants: Vers la fin de la justice des mineurs

Au cœur d’un projet de loi examiné en urgence ce mardi par les députés, deux réformes très inquiétantes de la justice des mineurs s’opposent à tous les principes en vigueur depuis la Libération.

En proposant d’une part des comparutions rapides pour les adolescents à partir de 13 ans, et d’autre part la création d’un tribunal correctionnel pour les jeunes récidivistes entre 16 et 18 ans, le gouvernement a signé l'arrêt de mort de la justice des mineurs. Il propose des solutions adultes, c'est-à-dire plus de prison et moins d’éducation. Alors que toutes les études montrent les limites de la comparution rapide, qui engendre un grand nombre d’erreurs judiciaires, et que les mesures qu’il propose vont explicitement à l’encontre de la convention des droits de l’enfant, le gouvernement persiste et signe, dans le droit fil du récent rapport Ciotti.

L’enfermement est sa seule politique. Une politique inefficace dénoncée par l'ensemble des professionnel, qui favorise la récidive. S’agissant des plus jeunes, ces mesures sont d’autant plus inacceptables, et témoignent de la résignation coupable de l'État. La droite pose en ce moment la première pierre d’une véritable école républicaine du crime.

Rapport Ciotti : « une dérive dangereuse et inefficace » (Nicole Borvo)

Par , le 07 June 2011

Rapport Ciotti : « une dérive dangereuse et inefficace » (Nicole Borvo)

Avec le rapport d’Eric Ciotti, on voit bien comment va fonctionner la campagne électorale du Président sortant. Quatre ans ministre de l’Intérieur, quatre ans Président de la République, il a battu tous les records des lois pénales répressives, agitant faits divers et peurs en permanence. Ce qui, d’ailleurs, est repris largement à son avantage par le Front national.

Le résultat n’est pas une baisse de la délinquance violente, bien au contraire !

Eric Ciotti, leader de la « droite populaire » bien connu pour ses positions sécuritaires, lui demande d’en rajouter dans l'enfermement et la réduction des alternatives à la prison. L'aménagement des peines et leur individualisation, sont pourtant nécessaires à la compréhension de la sanction par les personnes condamnées. Nicolas Sarkozy vient de soumettre au parlement une attaque sans précédent contre la justice des mineurs et l’instauration des jurés populaires contre les juges. Mais toujours rien sur les délits financiers !

Par contre, ce qui ne figure jamais au programme, c’est ce que réclame à cor et à cri l’ensemble des professionnels de la justice pour redonner du sens à la sanction pénale. Il faut des moyens pour prévenir et des moyens pour aider les personnes qui ont été sanctionnées pour une infraction à retrouver une place dans la société.

Je dénonce avec la plus grande force cette dérive dangereuse et inefficace.

 

Nicole Borvo, Présidente du groupe CRC – SPG et Responsable des questions de Justice au PCF,

Droit du licenciement et « mobilité »

Par Dirringer Josepha , le 31 May 2011

Droit du licenciement et    « mobilité »

Le droit du licenciement pour motif économique encadre les réorganisations d’entreprise qui ont pour conséquence la rupture de contrat individuel d’emploi. Pourtant, certaines réorganisations y échappent alors qu’elles ont des conséquences sur l’emploi des salariés, en particulier celles qui recourent à des dispositifs de mobilités géographiques et professionnelles de la part des salariés.

Les qualifications juridiques de la mobilité géographique et professionnelle décidée par  l’employeur

Il s’agit tout d’abord des restructurations procédant uniquement par un changement des conditions de travail. En droit du travail, on distingue la modification du contrat de travail du changement des conditions de travail. La première nécessite l’accord du salarié tandis que le second peut lui être imposé par l’employeur sans qu’il puisse refuser.

S’agissant de la mobilité géographique, la Cour de cassation considère que ne constitue qu’un simple changement des conditions de travail le changement de lieu de travail au sein d’une même zone géographique définie notamment au regard d’un critère d’accessibilité. Est également considérée comme un changement des conditions de travail la modification du lieu de travail en application d’une clause de mobilité. S’agissant de la mobilité professionnelle, l’employeur peut modifier le travail du salarié dès lors que cela correspond  à sa qualification professionnelle. Cette qualification est déterminée par les grilles de classifications prévues dans les conventions collectives de branche. Longtemps construites en termes de poste de travail, voire de fonctions à exercer, les grilles de classifications définissent davantage les emplois des salariés en termes de compétences. Ce faisant, l’emploi du salarié ne correspond plus à son poste de travail mais aux compétences qu’il a et qu’il apporte à l’entreprise. Et ainsi, on donne à l’employeur une marge de manœuvre beaucoup plus grande pour modifier l’emploi du salarié sans que celui-ci ne puisse refuser. Selon la manière dont est définie la qualification professionnelle du salarié, en termes de tâches, de fonctions ou de compétences, un même changement subi par le salarié sera analysé soit comme un changement des conditions de travail qu’il ne pourra pas refuser, soit comme une modification du contrat de travail qu’il pourra refuser. Le processus décisionnel reste alors dans les mains du seul employeur.

Un processus négocié avec les interlocuteurs sociaux  : la mobilité géographique et professionnelle  « volontaire »

Désormais obligés de négocier par le législateur, ces derniers sont appelés à conclure des accords sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC), reposant sur des plans de mobilités géographique et professionnelle. La loi du 18 janvier 2005, dite loi Borloo, instaure en effet une obligation triennale de négocier dans les entreprises et les groupes de plus trois cents salariés. Celle-ci porte sur les modalités d’information et de consultation du comité d’entreprise sur la stratégie de l’entreprise et ses effets prévisibles sur l’emploi, la mise en place d’un dispositif GEPC sur laquelle le comité d’entreprise est informé, et sur les mesures d’accompagnement  susceptibles de lui être associées, en particulier en matière de formation, de validation des acquis de l’expérience, de bilan de compétences et d’accompagnement de la mobilité  géographique et professionnelle  des salariés (1). Ces dispositifs conventionnels sont de plus en plus courus par les syndicats, qui voient là une manière d’éviter des licenciements, ainsi que par les employeurs désireux de restructurer leur entreprise sans devoir respecter la procédure légale de licenciement. Certains prétendront non sans ironie qu’il  s’agit d’accords  « gagnant gagnant ». à tout le moins s’entrevoit leur équivocité.

Ces deux types de restructurations, silencieuses voire insidieuses, montrent les limites que connaît  aujourd’hui le droit du licenciement pour motif économique. L’un des dangers de ces modes de restructuration tient à l’absence de garanties individuelles et collectives offertes aux salariés au moment où leur sont proposées des mobilités géographiques et/ou professionnelles. Individuellement, la seule garantie dont les salariés peuvent bénéficier, le cas échéant, est celle du licenciement pour motif personnel. Au contraire, le droit du licenciement pour motif économique encadre la mobilité géographique et/ou professionnelle aussi bien en amont de la rupture du contrat,  lorsqu’est proposée aux salariés une modification de leur contrat de travail, qu’en aval lors du reclassement proposé au salarié ou, après la décision de licencier, au moyen des conventions de reclassement personnalisées ou de congé de reclassement.

Plus encore,  s’efface tout contrôle sur la raison économique qui anime l’employeur, dont on ne peut apprécier ni la réalité, ni la pertinence, ni la raisonnabilité. Cela apparaît certainement lorsque le chef d’entreprise effectue une restructuration au moyen de changements des conditions de travail. L’imputabilité de la décision ne fait ici aucun doute. Cela est plus délicat lorsque sont en cause des accords collectifs GPEC qui expriment la volonté de l’employeur et celle des organisations syndicales signataires. Le législateur n’a d’ailleurs pas défini ce qu’il entendait par « gestion prévisionnelle des emplois et des compétences  ». Certes, il ressort de la loi que celle-ci revêt une dimension civique dès lors qu’elle a notamment pour objet « la prévention des conséquences des mutations économiques  ». Les sciences de gestion définissent ces dernières comme « le fait de faire correspondre  les compétences des salariés à l’activité de l’entreprise et à ses perspectives d’évolution en identifiant les compétences critiques qu’il faut conserver, développer, et/ou acquérir à court et moyen terme ». Il s’agit donc d’un instrument de gestion à des fins organisationnelles. Cette définition renvoie assurément à une conception patronale. Pourtant, en tant qu’objet de négociation collective, les syndicats sont également appelés à en préciser le sens, rendant possible une transformation du concept même de GPEC.

Les restructurations  qui procèdent au moyen de plans de mobilité négociés ne sont pas seulement légitimées par l’accord des représentants des salariés. Elles s’appuient également sur le consentement individuel du salarié. De nombreux accords instaurent en effet des bourses d’emploi – sortes de marché du travail interne à l’entreprise. Le principe en est le suivant. L’employeur publie des offres d’emploi auxquelles les salariés postulent. Ce faisant, c’est le salarié qui est en partie à l’initiative de sa mobilité géographique ou professionnelle. Certains accords prévoient également des dispositifs de mobilité externe. Il s’agit alors d’inciter les salariés à trouver un emploi dans une autre entreprise au moyen d’une prime ou d’une promesse de réembauchage. Là encore, c’est le salarié qui est à l’initiative, c’est lui qui décide de partir, le rendant acteur de la suppression de l’emploi qu’il occupe. Et c’est là que se trouve une des ambitions poursuivies par les accords de gestion de l’emploi. La dissimulation du pouvoir de l’employeur n’est pas seulement symbolique ; elle est aussi juridique, dès lors que la mesure n’a pas sa source dans une décision unilatérale de l’employeur mais dans un accord de volontés ou dans la volonté individuelle du salarié.

Ainsi, la suppression des emplois est rendue socialement acceptable  par le seul fait que les salariés y aient consenti, directement ou par l’intermédiaire de leur représentant. Il importe peu de connaître les raisons économiques plus profondes ou de prendre en compte les conséquences de la suppression d’emploi autres que celles subies par les salariés de l’entreprise en restructuration.

Le consentement des salariés est alors invoqué pour légitimer et rendre incontestable la restructuration de l’entreprise. Corrélativement,  le consentement de l’employeur paraît quant à lui doté d’une force beaucoup moins grande dès lors que celui-ci, un fois exprimé, ne ferme pas la porte à de possibles licenciements pour motif économique. On sait déjà que « la régularité de la consultation du comité d’entreprise sur un projet de licenciement économique  n’est pas subordonnée  au respect préalable  par l’employeur de l’obligation  d’engager tous les trois ans une négociation portant sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences imposée par l’article 2242-15 » (2). Mais on peut certainement ajouter que la mauvaise exécution d’un accord de gestion de l’emploi ne soit pas un obstacle suffisant pour interdire à l’employeur de supprimer des emplois pour une raison économique (3).

Dépasser le droit du licenciement pour motif économique

Il existent des limites sont intrinsèques au droit du licenciement pour motif économique liées à sa définition même. Comment distinguer les mobilités consécutives à une procédure de licenciement pour motif économique de celles prévues par un plan de mobilité ? La réponse demeure incertaine. De pareilles difficultés surgissent lorsqu’il s’agit de déterminer quand l’une commence, quand l’autre s’achève. Ce flou est entretenu par la loi elle-même. Ainsi permet-elle qu’un accord de GPEC prévoit le recours au congé de mobilité qui est en principe prévu dans le cadre d’un licenciement pour motif économique.

Dès lors, les stratégies patronales de contournement de la réglementation, de même que les innovations conventionnelles situées à la marge du droit étatique conduisent à interroger le sens et la visée de la législation actuelle. Certains considèrent que le champ que propose aujourd’hui le droit étatique est bien trop restreint. D’autres considèrent qu’il serait vain de vouloir interdire ces formes de restructurations et peu pertinent de vouloir étendre le droit du licenciement pour motif économique. Un forçage des catégories juridiques n’aurait que peu de sens dès lors que ces restructurations n’ont pas vocation à déboucher sur des ruptures de contrats de travail.

Mais cela ne signifie pas qu’il ne faille pas s’inspirer du droit du licenciement pour motif économique. La conclusion de l’accord pourrait être soumise à la mention de certaines clauses obligatoires visant à assurer l’information  des salariés ; de même, la mise en œuvre du plan de mobilité pourrait exiger une information régulière des représentants des salariés et de l’inspection du travail ; il serait aussi possible de généraliser les garanties individuelles pour les salariés, comme la précision et l’objectivité des conditions d’accès aux postes ouverts à la mobilité ; ou encore de prévoir des critères de sélection sur le modèle des règles sur l’ordre des licenciements. Il s’agirait de dépasser le paradigme du licenciement pour motif économique et de construire un droit de l’emploi et des restructurations. Dans cette perspective, ce qui importe est l’existence objective d’une raison économique à l’origine de la restructuration qu’il faut révéler pour ensuite l’encadrer juridiquement. Mais le contrôle d’une raison économique objectivée ne doit pas conduire à oublier entièrement la question de l’imputabilité de la décision de la restructuration,  ni celles relatives à la mobilité des salariés : un contrôle doit exister à l’égard de celui ou de ceux qui en sont à l’origine. D’une part, qu’il soit unilatéral ou qu’il soit en partie négocié, on considère que le processus décisionnel doit être encadré, mais l’employeur reste maître de la stratégie de l’entreprise. D’autre part, la mobilité du salarié affecte directement la relation individuelle de travail ; or, quel que soit le fondement au moyen duquel l’employeur agit, ce dernier conserve son pouvoir de direction à l’égard du salarié qui lui demeure subordonné.

(1) à ces deux thèmes obligatoires de négociation s’ajoutent des domaines facultatifs de négociation. Un accord de GPEC peut contenir un accord de méthode qui est un accord dérogatoire à la loi permettant de déroger aux modalités légales d’information et de consultation du comité d’entreprise dans le cadre d’une procédure de licenciement pour motif économique. Enfin, dans les entreprises de plus  de mille salariés, l’accord  de GPEC  organise le congé de mobilité prévue par le Code du travail.

(2) Décision de la chambre sociale de la Cour de cassation du 30 septembre 2009.

(3) à condition qu’elle constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Démission Tron : "cette affaire de plus est l'affaire de trop" (Pierre Laurent)

le 30 May 2011

Démission Tron :

La démission de Georges Tron est logique. La justice doit suivre son cours en toute indépendance et le sexisme être combattu avec la plus grande fermeté. Cette affaire de plus est l'affaire de trop!

Nicolas Sarkozy porte une responsabilité première dans le climat qui pourrit la vie politique. Il forme depuis 4 ans des gouvernements de copains en nommant des ministres d'avantage pour leur docilité et leurs accointances que pour leurs compétences et leur éthique. La droite, pour sa défense, renvoie au PS le compliment sur DSK. Tout cela est détestable.

J'appelle nos concitoyens à ne pas se résigner à ce match de l'indécence et à construire loin de toutes ces dérives de nouveaux choix et de nouvelles pratiques politiques.

Pierre Laurent, secrétaire national du PCF

le 21 May 2011

Intervention sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et jugement des mineurs

Par , le 19 May 2011

Monsieur le Président, Monsieur le Ministre, Mes cher(e)s collègues, Ce texte est irrecevable sur la forme et sur le fond. Sur la forme : 1 – Rien ne vient justifier l'urgence ; 2 –Le présupposé est toujours le même : comme il est dit dans l'étude d'impact, les citoyens considèrent que « les décisions de justice ne prennent pas suffisamment en compte les évolutions de la société ». C'est ce que professe régulièrement le Président de la République. Celui-ci est boulimique de rapports : rapport Léger, Lamanda, Guinchard, Darrois, Varinard, Bockel… et maintenant le rapport Lachaud ! Et j'en omets. De ces rapports, le gouvernement retient ce qui va dans le sens de ce qu'il veut démontrer : à savoir qu'il agit et qu'il agit contre le laxisme des juges. Donc, aujourd'hui, nous avons un texte en procédure accélérée qui porte deux réformes – et même trois avec celle des cours d'assises – qui n'ont fait l'objet d'aucune concertation. Pourtant, nous le savons, les professionnels auditionnés par le rapporteur ont largement manifesté leur inquiétude, et sur les dispositions elles-mêmes, et sur leur applicabilité. Mais apparemment, vous n'en n'avez cure. Prenons l'introduction de ce que vous appelez les « citoyens assesseurs ». Au passage, je note que vous n'êtes pas à une incohérence près puisque jusqu'à présent, vous avez favorisé le juge unique. Deuxième incohérence : vous vouliez créer une cour d'assises simplifiée avec seulement 2 jurés. Notre rapporteur s'y est légitimement opposé. Néanmoins, le nombre de jurés passerait de 9 à 6 en première instance, avec pour effet une moindre représentation de la société. Ajouter que justifier une cour d'assises simplifiée pour porter remède à la correctionnalisation de nombreux crimes, me paraît précisément simplificateur des raisons de celle-ci. Concernant les assesseurs citoyens, ils sont depuis longtemps présents dans les tribunaux et ont prouvé leur utilité : par exemple dans les Conseils des prud'hommes, les tribunaux de commerce ou les tribunaux pour enfants – où vous voulez les supprimer d'ailleurs !-. Leur présence se fonde sur leur expertise et ils sont désignés pour plusieurs années. Ce que veut le Président de la République, c'est autre chose. Il le disait dans ses vœux pour 2010 : « Ainsi c'est le peuple qui pourra donner son avis sur la sévérité de la réponse à apporter à des comportements qui provoquent l'exaspération du pays ». Ajoutons ses propos sur l'immigration dans son discours de Grenoble sur la délinquance. Quand vous dites que le but n'est pas de renforcer les sanctions, permettez-moi d'en douter. Vous comparez les tribunaux correctionnels où les peines augmentent et les cours d'assises où elles ont tendance à diminuer. Mais si elles augmentent dans les premiers, c'est parce que, depuis 2002, l'inflation pénale aggrave les sanctions pénales pour les délits. En réalité, le parcours d'un juré et le rôle du jury en assises est totalement différent. Notamment parce que les jurés, divers par le nombre, disposent de temps pour écouter les parties – accusés et victimes - et peser la valeur des témoignages et des informations dont disposent les professionnels. Ensuite, cela dépend des actes incriminés. Nous savons par exemple que l'indulgence prévaut souvent pour les crimes passionnels. Or, en raison de la compétence du « tribunal correctionnel citoyen » que vous préconisez, pour beaucoup les violences aux personnes, notre rapporteur reconnaît qu'il « cible » de fait « une catégorie de délinquants qui, le plus souvent, se recrutent au sein d'une frange particulièrement démunie de la population ». Vous ajoutez : « d'autres formes de délinquance moins sociologiquement marquées continueront de relever des magistrats professionnels ». Vous avez vraiment du mal à cacher le contenu de classe de votre projet. Au fond, pour vous, les juges auraient besoin de la pression populaire pour sanctionner les vols et les agressions. Par contre, les jurés ne seraient pas capables d'avoir un avis – ou ils pourraient être trop sévères – sur les délits économiques et financiers pour lesquels, curieusement depuis quelques années, on voit au contraire des tentatives de dépénalisation ou de réduction de la prescription. Il y a ensuite une question incontournable : c'est celle de l'applicabilité de cette réforme. Ce que vous proposez induit une modification en profondeur des tribunaux correctionnels. Inévitablement, les jurés tirés au sort ne connaissant rien du dossier, la procédure sera plus orale qu'aujourd'hui et donc, modifiera la pratique et la durée des audiences. Vous prévoyez un doublement de celles-ci – ce sera beaucoup plus selon les professionnels - : avec quels magistrats, quels greffiers ? Et où, aucun tribunal n'ayant la surface nécessaire pour multiplier les audiences, surtout après la réforme de la carte judiciaire ? Encore une fois, la question des moyens réels dont dispose la justice n'est pas au centre du projet ! Soyons clairs : ce texte contribue à la défiance entretenue par le Président de la République à l'encontre des juges. D'où, dans votre projet, la participation des jurés tirés au sort aux décisions de libération conditionnelle. Étrangement d'ailleurs, vous supprimez au second degré les représentants d'association. Dans ce domaine, les décisions demandent une professionnalité importante : sur la prévention, la réinsertion… Quel sera le sens de l'intervention des jurés tirés au sort dans la prise de décision ? Disons clairement que vous jouez l'opinion publique, sans cesse sollicitée sur des faits divers, contre les magistrats. Si vous recherchiez, comme vous le dites, un rapprochement des citoyens de la justice, vous vous y seriez pris autrement. D'abord, une concertation aurait dû être menée sur une participation plus durable des citoyens dans une instance judiciaire - ce qu'on appelle l'échevinage auquel nous sommes, pour notre part favorables – sur la proportion entre professionnels et citoyens. Et vous auriez prévu, éventuellement, que ces derniers puissent être récusés. Ce n'est absolument pas ce que vous faites et nous ne pouvons que refuser ce que vous proposez. Comme pour la cour d'assises, nous défendrons des amendements. J'en viens maintenant à la réforme que vous voulez introduire dans la justice des mineurs. Précisons qu'elle n'était pas prévue à l'origine. Et il est éminemment critiquable d'amorcer ainsi, en urgence, une déstructuration grave de la spécificité de la justice des mineurs instaurée par l'ordonnance de 1945. Je pense pour ma part qu'il y a au contraire besoin de refonder dans des dispositifs législatifs cohérents les principes de la justice des mineurs déjà souvent écornés. Je précise que ces principes ont été depuis confirmés dans les engagements internationaux de la France postérieurs à 1945, comme la Convention internationale des droits de l'Enfant ou les Règles de Pékin. Ce qui ressort de ces principes, c'est précisément la distinction entre un mineur et un majeur. D'où la prévalence de l'éducatif, la spécificité des procédures et la spécificité des juridictions. Votre logique, comme celle de vos prédécesseurs depuis 2002, est totalement inverse. Le Président de la République disait le 10 février sur TF1 : « un délinquant de 17 ans, 1,85 m, que l'on amène devant le tribunal pour enfants, ce n'est pas adapté… Un mineur d'aujourd'hui n'a rien à voir avec ce qu'était un mineur en 1950 ». Ces propos, nous les entendons à chaque occasion. Ils seraient risibles s'ils ne sous-tendaient pas une volonté politique. En effet, à chaque époque, les mineurs sont différents, comme les majeurs, comme les institutions, comme les dirigeants. Nous sommes nous-mêmes très différents des législateurs de 45. Vous nous avez dit, Monsieur de Ministre, que ce qui a changé depuis 1945, c'est le travail et la famille. Faut-il entendre que, quand il n'y a plus de travail pour les jeunes et que les familles sont en grande difficulté, il faut pénaliser les mineurs ? Là aussi, j'y vois le caractère de classe de vos propositions. D'ailleurs, je note que, selon votre logique, les enfants des classes populaires seraient très rapidement majeurs ; par contre, ceux des classes aisées pourraient rester mineurs très longtemps puisqu'ils font des études. Votre affichage est toujours le même : tolérance zéro et risque zéro face au laxisme de la justice des mineurs. Vous prenez des risques car, entre nous, ce n'est pas très crédible. Or, selon le rapport, 7 mineurs sur 10 ne réitèrent pas dans l'année suivant la fin de leur prise en charge. Le taux de réponse pénale est de 93 % pour les mineurs, 87 % pour les majeurs. Et les mises en cause ont augmenté entre 2002 et 2009 de 32 % pour les majeurs et 19 % pour les mineurs. A partir de votre objectif, vous bouleversez la cohérence de la justice des mineurs. Vous l'avez déjà fait en introduisant une forme de comparution immédiate, les peines-plancher pour les mineurs récidivistes, etc… Vous avez déjà opéré un clivage entre la jeunesse en danger et la jeunesse délinquante, alors qu'on sait bien qu'il y a un lien direct entre les deux. Vous confondez volontairement réponse rapide et jugement. Vous mettez donc en œuvre une justice expéditive axée sur la seule sanction pénale. Le tribunal correctionnel pour mineurs est conçu pour les mineurs récidivistes de 16 ans passibles d'une peine de prison de trois ans minimum. Or, le critère de récidive est facilement retenu pour des mineurs qui commettent souvent plusieurs délits sur un bref laps de temps. Il concernera donc beaucoup de cas. Confier la présidence du tribunal correctionnel pour mineurs au juge des enfants ne changera rien. Il disparaît de l'audiencement, pourtant outil de travail avec les mineurs. Il jugera des jeunes qu'il ne connaîtra pas. Pourtant, sa spécificité est de piloter le processus, donc de pouvoir s'intéresser à la personnalité du mineur, de disposer de temps entre le moment où il lui est présenté et le moment où il sera éventuellement déféré devant un tribunal et jugé. Contrairement à ce que vous voulez faire croire, les professionnels font observer que les mineurs entrés en délinquance préféreraient souvent passer rapidement devant un tribunal plutôt que d'être pris en charge pour en sortir. Précisément, notre responsabilité, ce n'est pas les envoyer faire de petits séjours en prison où ils risquent fort de s'ancrer encore plus dans la délinquance, mais de les prendre en charge sur une longue période. Le dossier unique de personnalité pouvait faire consensus. Mais vous placez son contrôle, certes sous l'autorité du juge des enfants, mais aussi du procureur ; vous y versez des éléments recueillis lors de procédures d'assistance éducative relatives donc aux parents, à la fratrie du mineur… ce qui aura pour effet de le « marquer » et donc de le figer dans la fatalité sociale. La convocation par OPJ s'ajoute à la présentation immédiate et à la comparution à bref délai. Elle donne au procureur le pouvoir de décider des suites. La phase d'instruction devant le juge des enfants sera alors supprimée, le mineur ne le rencontrant qu'à l'audience. Avec ce texte, vous accroissez encore les pouvoirs du procureur au détriment du juge des enfants. Les mineurs de 13 ans pourront être assignés à résidence sous surveillance électronique mobile. Alors que le bracelet électronique est difficile à mettre en œuvre pour les majeurs, croyez-vous vraiment qu'un mineur par exemple déscolarisé et en rupture familiale va être en mesure de s'y soumettre ? En réalité, vous accélérez l'enfermement, et vous le faites d'ailleurs avec tous vos dispositifs. Ainsi, vous banalisez la détention provisoire et le placement en centre éducatif fermé, puisque vous étendez le champ du placement sous contrôle judiciaire des mineurs de treize ans. Il est à craindre que les CEF deviennent bientôt le passage obligé pour les mineurs délinquants. Vous avez dit, Monsieur le Ministre, qu'il n'était pas question de toucher aux foyers classiques. Mais vingt foyers éducatifs vont encore être transformés en CEF ! Or, leur fonctionnement, l'absence de projet éducatif sur la durée, c'est-à-dire d'un « avant » et d'un « après » ont été critiqués : par Madame Versini, Défenseure des Enfants, par le Contrôleur général des lieux de détention dans son dernier rapport et par les professionnels. Vous n'attendez même pas les conclusions du rapport du groupe de travail sur l'évaluation des CEF et des EPM dont sont co-rapporteurs nos collègues Jean-Claude Peyronnet et François Pillet. Vous préférez stigmatiser les parents, toujours les mêmes, ceux que Monsieur Wauquiez accuse de fraude au RSA et de préférence pour l'assistanat : avec de tels propos destinés à être relayés dans l'opinion publique, quelle image auront d'eux leurs enfants ? Est-ce que la meilleure façon de les impliquer dans le procès judiciaire est de les amener au tribunal entre deux policiers ou gendarmes ? Est-ce là la « nouvelle économie de la sanction parentale » que prône notre collègue Jean-Marie Bockel dans son rapport ? Qu'il faille une « réponse » rapide à un acte commis par un mineur : oui. Mais réponse ne veut pas dire sanction pénale systématisée. Cela veut dire intervention rapide du juge des enfants. Et si les délais de la réponse pénale sont souvent trop longs, c'est parce que vous refusez de donner aux magistrats et à la PJJ les moyens de leurs missions. Avec ce texte, les mineurs récidivistes de 16 ans seront traités comme des majeurs ; et les 13-16 ans comme les 16-18 ans aujourd'hui. Tout le contraire par exemple de l'Allemagne où les jeunes majeurs jusqu'à 21 ans peuvent être jugés comme des mineurs. Le 13 mai, notre groupe a organisé un colloque dont l'intitulé était : « Nos enfants ne nous font pas peur, mais le sort qu'on leur réserve nous inquiète ». Nous avons réuni des professionnels de la petite enfance, de l'éducation, de la justice… Tous ont fait part de leur inquiétude, des difficultés croissantes et de la souffrance qu'ils éprouvent dans l'accomplissement de leurs missions. Comment en effet ne pas s'inquiéter, quand les jeunes sont stigmatisés ? Et, qui plus est, dans la droite ligne de Monsieur Bénisti, dès la maternelle ? Oui : il y a beaucoup à faire contre la délinquance des mineurs. La société doit prendre ses responsabilités au travers d'une politique réparatrice et non simplement répressive. Nous nous opposons à ce texte. Nous défendrons des amendements de suppression d'articles, et des amendements destinés à annuler des aggravations que vous avez inscrites depuis dix ans dans la loi.

DSK : Faire preuve de responsabilité dans le traitement de cette affaire grave

le 17 May 2011

DSK : Faire preuve de responsabilité dans le traitement de cette affaire grave

La nature et la gravité des faits en cause devraient inciter tous les responsables politiques et tous les médias à la plus grande responsabilité dans le traitement de cette affaire.

Il en est ainsi de la présomption d'innocence et du respect dû à chacun des deux protagonistes. Par ailleurs, la notoriété de l'un d'eux ne peut servir à banaliser le viol, à alimenter la surenchère médiatique ou à entraver le cours de la justice.

En France, 25 000 femmes sont violées chaque année. Le viol est un crime qui ne peut, sous aucun prétexte, être minimisé sous peine d'empêcher les victimes de se reconstruire.

Laurence Cohen, Responsable  de la commission « Droits des femmes/féminisme » au PCF

Inculpation de DSK : réaction de Pierre Laurent

Par Pierre Laurent, le 15 May 2011

Inculpation de DSK : réaction de Pierre Laurent

C'est une nouvelle consternante. La justice américaine doit faire son travail. Dominique Strauss Kahn doit recevoir le même traitement que tout justiciable. Si les faits sont avérés, c'est extrêmement grave car le viol est un crime. En attendant, placer cette affaire au centre du débat présidentiel ne ferait que salir encore notre vie politique. Ne laissons pas la politique tomber dans le caniveau où l'entraîne la personnalisation outrancière des enjeux de 2012.

Les Françaises et les Français attendent des forces politiques un tout autre débat et des engagements concrets pour répondre à leurs attentes. Le Parti communiste français est décidé à y prendre toute sa place.

Pierre Laurent, Secretaire national du PCF

Un pacte pour les services publics

le 06 May 2011

L'éducation, la santé, la protection sociale, la recherche, l'énergie, l'eau, les transports, les télécommunications, le crédit, le logement, la Poste, la sécurité, la justice sont notre patrimoine commun répondant à la satisfaction des besoins des populations et à l'intérêt général.

Nous ferons nôtres les objectifs du Pacte pour les services publics, adopté aux États-Généraux de janvier 2011, fondés sur le principe de réappropriation sociale, d'égalité et de solidarité, de reconquête du bien commun par le peuple dans le plein exercice de sa souveraineté et sur l'ambition d'un développement économique soutenable.

Nous reconstruirons, développerons et créerons des services publics, sous toutes leurs formes, définis démocratiquement par les citoyens, les salariés et leurs élus assurant une répartition des richesses qui doit permettre l’effectivité des droits et financés par une fiscalité juste et redistributive, une taxation des revenus et des actifs financiers, la taxation des revenus du patrimoine ainsi que la suppression des exonérations de cotisations sociales patronales et des niches fiscales qui, aujourd'hui, profitent aux hauts revenus et aux grandes entreprises.

Les moyens et les outils des services publics seront renforcés avec des financements dégagés de l’emprise des marchés financiers pour leur permettre de remplir leurs missions au service de l’intérêt général et en dehors de toute contrainte de rentabilité financière. Dans ce cadre, toutes les formes assurant ces services seront soutenues : le service public national, la régie, l’appel à un outil de statut public ou d’économie mixte, la S.A. à capital public, la délégation de service public, le recours aux associations et à l’économie sociale et solidaire.

Un service public de l'information et de la culture, soustrait du pouvoir de l'argent et des pressions politiques, sera le garant du pluralisme et de l'exercice de la citoyenneté.

L’Etat garantira l’accès de chacune et de chacun à la pratique sportive de son choix tout au long de la vie. Il donnera au mouvement sportif les moyens de l’accomplissement de ses missions de service public.

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Suspension provisoire de la condamnation à mort de Mumia Abu-Jamal : "un encouragement à la mobilisation"

le 27 April 2011

Suspension provisoire de la condamnation à mort de Mumia Abu-Jamal :

Dans le couloir de la mort depuis bientôt 30 ans, le journaliste noir Mumia Abu-Jamal ne cesse de clamer son innocence. Depuis bientôt trente ans, le droit de se défendre sur le fond lui est dénié. Encore récemment, en 2010, la Cour suprême des États-Unis lui a refusé un nouveau procès. C’est dans ces conditions que la Cour d'Appel Fédérale de Philadelphie vient de confirmer pour la deuxième fois en trois ans la suspension provisoire de sa condamnation à mort.

Un nouveau jury va devoir se prononcer. Il ne pourra le faire, hélas, que sur la base d’une terrible alternative : soit confirmer la sentence de mort, soit condamner Mumia à la prison à perpétuité. Et en attendant, celui-ci demeurera dans le couloir de la mort. Mais la décision que vient de prendre la Cour d’Appel Fédérale contre l’avis de la Cour suprême constitue un encouragement pour son équipe de défense et pour le développement de la mobilisation qui, rappelons-le, a déjà permis à Mumia d’échapper par deux fois à l’exécution capitale.