Collectif culture du PCF

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Un grand débat sur la création et son appropriation sociale lors de la Fête de l'Humanité 2011. Avec Robin Renucci, tout nouveau directeur des Tréteaux de France, le psychanalyste Roland Gori, les responsables politiques Alain Hayot pour le Parti communiste et Aurélie Filippetti pour le Parti socialiste.

 
 

« La France qui se lève tôt ne raconte plus ses rêves »

Comment définir une politique culturelle en période de crise ? La question était posée dimanche sur la scène de l’agora. « La culture doit être au cœur du projet de transformation de la société », répondent politiques, comédiens et psychanalystes.

Robin Renucci, comédien. « « Tout commence comme cela : par l’adresse des uns aux autres. Celui à qui l’on s’adresse est capable à tout moment d’intervenir. Pour que nous puissions échanger nos opinions et pas seulement nos avis. Dans son Manifeste, Condorcet disait que, tant qu’il y aura des hommes qui n’auront pas leur propre opinion mais qui recevront l’opinion d’autres, il y aura deux mondes, celui des maîtres et celui des esclaves, celui des hommes qui croient et celui de ceux qui pensent. Nous allons passer 100 000 heures devant nos postes de télévision sur les 700 000 heures que nous avons à vivre, dont 65 000 heures de temps de travail. Cela signifie 100 000 heures devant un écran de sidération, où la pensée peut être arrêtée. À l’opposé de ce que je disais en préambule, le flux médiatique fabrique l’opinion. Comment reconstituer de l’institution de programmes ? Nous avons fondé une association en Haute-Corse, l’Aria, un lieu de rencontres permanent. Je suis aussi directeur des Tréteaux de France, je propose au territoire national la capacité de dialoguer ensemble, non pas en apportant la culture à ceux qui seraient supposés ne pas en avoir, mais, au contraire, en partant du postulat que nous sommes tous, intrinsèquement, porteurs de culture. Il faut mettre en place le partage de nos cultures par l’action politique. Je prône non pas un ministère de la Culture, mais un ministère des Affaires culturelles et artistiques. » Roland Gori, psychanalyste. « La culture n’est pas simplement un secteur de l’existence sociale qui viserait à nous divertir des conditions tragiques de l’existence. La culture représente un monde en commun que nous avons tendance à perdre, dans une civilisation des mœurs où chacun est affecté à des postes très techniques. Aujourd’hui, la place des humanités, que l’on appelle parfois les sciences humaines et sociales, est mineure par rapport aux voies royales dans les universités que sont les études commerciales et économiques. Il y a un repli de la hiérarchie des valeurs. Nous sommes soumis à une sursimulation des industries de programmes. Raconter son rêve à quelqu’un, c’est partager une expérience avec lui, à partir de laquelle il peut lui aussi élaborer ses rêves. C’est essentiel pour se nourrir et se construire. Or, la France qui se lève tôt n’a plus le temps de raconter ses rêves. Lorsqu’on n’a plus le temps de raconter des histoires, on tend vers une société purement animale, où chacun est assigné à une tâche fonctionnelle. La grande menace, c’est que nous vivons dans une civilisation technico-économique qui laisse peu de place à la pensée. Sans culture, nous n’avons aucune chance de pouvoir un jour construire notre identité. » Aurélie Filippetti, députée socialiste de Moselle. « Ce que nous avons perdu ou ce que nous risquons de perdre, c’est un idéal culturel au cœur d’un projet politique de gauche. Cet idéal, c’est notre vision collective et la place que nous donnons à la culture dans la société. Quelle confiance nous avons dans notre capacité à changer le monde à travers, avec et pour la culture ? Nous sommes à la Fête de l’Humanité, lieu de la contre-culture communiste. Nous avons perdu cette place éminente de la culture au cœur de la gauche. L’individualisme a touché toutes les couches sociales et se traduit aussi dans les pratiques culturelles. Un accès massif à une certaine forme de culture via la télévision. Comment répondre à cet individualisme ? Nous sommes assez démunis et dans une phase tâtonnante. À l’individualisme, s’ajoute le mouvement de dépouillement de l’État, du ministère de la Culture. Le politique est dépouillé de l’un de ses leviers majeurs pour construire une vraie politique culturelle. La question qui se pose à nous, c’est comment définir une politique culturelle dans un contexte de crise économique ? Nous avons besoin de développer l’accès à la démocratie culturelle pour lutter contre l’inégalité de l’accès à la culture. » Alain Hayot, responsable 
de la commission culturelle du PCF. « Depuis quelques années, on nous dit que la culture n’est pas la priorité. Il y a même un populisme culturel, inspiré par le sommet de l’État, qui consiste à dire que la priorité culturelle doit s’adapter à l’Audimat, à la demande. Mais la question posée doit d’abord être celle du sens, de savoir si on considère que l’enjeu culturel est la condition d’une politique d’émancipation. Je ne vois pas comment la gauche serait porteuse d’une politique transformatrice si elle ne pose pas la culture comme un enjeu transversal. Les communistes ont été la première force politique en France à considérer comme un enjeu important l’art et la création. Aujourd’hui, il y a urgence. Notre première exigence : garantir les libertés d’opinion, créer les conditions d’un nouveau souffle de l’imaginaire. Mais on n’y arrivera pas si on ne se repose pas les conditions de la rencontre entre l’art et le peuple, autour des objectifs émancipateurs qui sont les nôtres. Cela passe par l’éducation artistique et populaire, dans la cité mais aussi dans l’entreprise. Cela suppose aussi un autre rapport avec l’audiovisuel et le Web. Nous sommes face à une gigantesque révolution informationnelle qui est complètement détournée. Il n’y a pas d’émancipation politique sans émancipation culturelle. » Compte rendu de 
Marie Barbier
 

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